L’allaitement post cancer du sein

Les femmes touchées par le cancer du sein peuvent conserver leur habilité à allaiter leur enfant dans certains cas, mais pas tous. Cette tumeur touche les femmes de tous les âges et à n’importe quel moment de leur vie. Ainsi, un cancer du sein peut se déclencher alors que la femme est enceinte ou lorsqu’elle a accouché et qu’elle allaite.

En France, entre 400 et 500 cancers du sein sont diagnostiqués pendant la grossesse chaque année.

Comment est déterminée la possibilité ou non d’allaitement post cancer du sein ?

L’ampleur de la tumeur

Les patientes ayant subi une double mammectomie ou mastectomie bilatérale (ablation chirurgicale des deux seins) ne peuvent plus allaiter, car l’ensemble des canaux galactophores sont retirés au cours de ce type d’intervention.

Dans le cas d’une simple mastectomie, la mère peut allaiter son enfant avec le sein non touché par la maladie, car sa production de lait est suffisante. Dans certains cas, il demeure possible d’allaiter avec le sein opéré. Dans tous les cas, il revient au cancérologue d’étudier toutes les possibilités en fonction du type et du stade du cancer du sein, de la thérapie adoptée, de l’intervention chirurgicale et des séquelles du traitement.

Outre la possibilité physique d’allaiter, il faut tenir compte des douleurs après une reconstruction mammaire. Les femmes souffrant des séquelles de leur traitement peuvent recourir à diverses thérapies pour faire cesser les symptômes post opératoires : antalgiques, analgésiques, corticoïdes, drainages, massages ou neurostimulation électrique transcutanée.

[ A lire aussi : L’allaitement, les avantages et inconvénients ]

Les risques de récidives

Le médecin peut s’inquiéter des risques de récidives et déconseiller l’allaitement. Il peut aussi imposer un délai de sevrage. Le risque ne provient pas de l’allaitement lui-même, mais ce dernier affecte la densité des tissus mammaires, ce qui fausse les analyses de contrôle. Les résultats de la surveillance peuvent être mal interprétés et la récidive peut alors être ignorée.

Le sevrage (provisoire ou définitif) vise à retrouver une densité des tissus plus faible, permettant un contrôle plus précis lors des échographies et mammographies.  

Quels sont les risques  pour le bébé comme pour la mère d’un allaitement post cancer du sein ?

La question des dangers relatifs à l’allaitement après le traitement du cancer du sein s’est longtemps posée. Les études les plus récentes affirment que ni l’enfant ni la mère ne courent de danger pour certaines thérapies. En revanche, l’allaitement peut être interdit pendant et après un traitement médicamenteux.

Il demeure toujours préférable qu’un nourrisson soit nourri par le lait de sa mère. Celui-ci constitue l’alimentation la plus bénéfique à l’enfant et l’allaitement lui permet de nouer des liens privilégiés avec sa mère.

L’allaitement apparaît également bénéfique pour la mère. Ce geste en faveur de son enfant crée une proximité et exerce une influence positive sur son moral. Or, il est depuis longtemps prouvé que le mental occupe une place prépondérante dans la guérison d’une maladie aussi éprouvante que le cancer du sein. Par ailleurs, l’allaitement présenterait des vertus bénéfiques contre le cancer du sein.

allaitement cancer

L’allaitement avant et pendant le traitement parfois interdit 

Les outils utilisés contre le cancer du sein sont la radiothérapie, la chimiothérapie, l’hormonothérapie et la chirurgie mammaire.

L’allaitement et la radiothérapie

Si la patiente suit une radiothérapie, sans traitement médicamenteux concomitant, elle peut avec l’accord préalable de l’oncologue radiothérapeute allaiter son enfant.

Toutefois, la radiothérapie affecte le sein traité et peut interférer sur la quantité de lait produite. Elle peut diminuer, voire s’arrêter. La mère doit alors allaiter uniquement avec le sein qui n’est pas traité.

L’allaitement et la chimiothérapie ou l’hormonothérapie

La chimiothérapie est un traitement médicamenteux. Les substances antitumorales qu’elle contient s’avèrent hautement toxiques. Les scientifiques estiment qu’ils ne disposent pas du recul nécessaire pour garantir que ces toxines ne passent pas dans le lait maternel. C’est pourquoi, au nom du principe de précaution, l’allaitement est interdit durant un traitement de chimiothérapie.

L’alternative à la chimiothérapie est l’hormonothérapie. Ce traitement médicamenteux présente un risque élevé de contamination du lait et interdit par conséquent l’allaitement.

L’allaitement et la chirurgie mammaire

Lorsque le chirurgien cancérologue envisage une chirurgie mammaire, il interdit généralement l’allaitement avant l’intervention. En effet, la production de lait, puis sa succion par l’enfant engendrent des fluctuations du sein, modifiant sa taille et sa densité. Par ailleurs, l’hypervascularisation provoquée par le processus de la production de lait rend délicate l’opération.

L’allaitement à la suite du traitement du cancer du sein

L’allaitement après la radiothérapie

L’allaitement après la radiothérapie n’est pas interdit, mais pas toujours possible. En effet, le traitement peut provoquer une fibrose des tissus du sein (augmentation anormale de la quantité de tissu conjonctif fibreux) entravant la production de lait. Le nourrisson peut aussi éprouver des difficultés à téter si le traitement a altéré la texture du mamelon.

L’allaitement après la chimiothérapie ou l’hormonothérapie

La chimiothérapie ou l’hormonothérapie disséminant de nombreuses toxines dans l’organisme de la mère, l’allaitement demeure interdit à la fin du traitement. Il revient à l’équipe médicale de déterminer à quel moment il est possible d’allaiter, après que l’organisme a excrété toutes ces substances néfastes pour l’enfant.

L’allaitement après la chirurgie mammaire

Lorsque l’ablation mammaire touche les deux seins, l’allaitement devient impossible. Si elle ne touche qu’un sein, la mère peut allaiter avec le sein conservé intact. Généralement, la production de lait reste suffisante.

La tumorectomie étant considérée comme une chirurgie conservatrice, elle peut permettre d’allaiter. Ce traitement chirurgical consiste à retirer la tumeur maligne, ainsi que les tissus suspects avoisinants. En revanche, les tissus sains sont conservés, contrairement à la mammectomie, ce qui permet l’allaitement.

Toutefois, quel que soit le type d’opération, des tissus peuvent avoir été touchés et affecter la lactation. Les lésions apparaissent au niveau de la vascularisation, les canaux de transmission, ainsi que du système musculaire et nerveux.

Enfin, l’allaitement peut être entravé par la déformation du mamelon reconstruit.

L’allaitement après la reconstruction mammaire

Les femmes ayant eu recours à une reconstruction mammaire peuvent encore allaiter, grâce à leurs prothèses mammaires.

Dans tous les cas, si la patiente souffre de séquelles rendant l’allaitement douloureux, elle peut recourir à des traitements additifs ne présentant pas de danger pour l’enfant et lui permettant d’allaiter sans en souffrir.


Article rédigé par le Docteur Eric Sebban

  • Le Docteur Eric Sebban est chirurgien cancérologue, spécialisé en chirurgie gynécologique, mammaire et cancérologique.
  • Ancien interne des Hôpitaux de Paris.
  • Ancien Chef de Clinique Assistant des Hôpitaux de Paris.
  • Ancien Assistant du service du Centre Anticancéreux Gustave Roussy
  • Vice-président de l’Institut du Sein Henri Hartman (ISHH)
  • Co-fondateur de l’Institut Rafaël

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